Le Préjudice corporel: comment chiffre-t-on l’indemnisation?
Sujet délicat pour beaucoup de victimes d’accident – ou d’infraction – qui a pour conséquence d’engendrer parfois de lourds préjudices voire des séquelles. Il n’est pas toujours facile de comprendre comment chiffrer objectivement ce préjudice. Il existe pour cela un barème de référence qui permet aux Avocats de proposer un chiffrage du préjudice, et au Juge de rendre une décision objective.
Il s’agit d’un barème – Nomenclature DINTILHAC – qui pose des bases d’évaluation du préjudice. Avant de voir le barème lui-même, il est essentiel de comprendre les étapes permettant une évaluation de ce préjudice.
ETAPE 1 : VOUS ETES VICTIME DIRECTE
Vous avez subi, soit un accident de la circulation, soit un accident médical, ou encore vous êtes victime d’une agression.Cet accident ou agression, vous a causé un préjudice corporel.
Pour évaluer votre préjudice, un Expert devra être saisi. Si vous avez subi un accident, il est possible de vous rapprocher de votre assurance qui diligentera un Expert amiable pour évaluer votre préjudice. Si un juge est saisi, dans ce cas, un Expert judiciaire sera désigné.
ETAPE 2 : L’EXPERTISE
L’Expert désigné vous examinera physiquement et évaluera également les conséquences de votre préjudice sur votre vie quotidienne, professionnelle et privée.
Il fixera aussi la date de consolidation. II s’agit de la date à laquelle l’Expert estime que votre état ne pourra pas évoluer et s’aggraver.
Cet Expert rendra son Rapport d’Expertise et c’est sur la base de ce rapport que le chiffrage pourra s’effectuer.
OUI, MAIS COMMENT ?
ETAPE 3 : L’ANALYSE DU RAPPORT
L’Expert va suivre la nomenclature DINTILHAC et évalue les préjudices selon deux catégories et deux sous catégories (avant et après consolidation) :
- Les préjudices patrimoniaux
- Les préjudices patrimoniaux temporaires
- Les préjudices patrimoniaux permanents
- Les préjudices extra-patrimoniaux
- Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires
- Les préjudices extra-patrimoniaux permanents
ANALYSONS CHACUNE DES CATÉGORIES :
Les préjudices patrimoniaux
Il s’agit d’évaluer l’ensemble des dépenses et autres conséquences financières.
Temporaires (avant consolidation) :
Dépenses de santé actuelles :
Il s’agit de l’ensemble des dépenses médicales pris en charge par l’Organisme de sécurité sociale.
Frais divers :
S’il reste des frais médicaux à la charge de la victime, il conviendra de produire les justificatifs. Ex : frais de transport, honoraires du médecin de la victime.
Perte de gains professionnels actuels:
Perte de gains qui n’a pas été compensé par les indemnités journalières ou autre compensation.
Permanents (après consolidation) :
Dépense de santé futures :
Il s’agit des dépenses qui vont devoir être faites pour, par exemple, un renouvellement d’un équipement médical.
Frais de logement/ Véhicule adapté:
C’est notamment le cas lorsque la victime se retrouve handicapée et qu’il est nécessaire d’aménager le logement.
Pertes de gains professionnels futurs:
Ici, il s’agit de la perte de revenus consécutive à l’incapacité permanente de la victime.
Incidence professionnelle:
Il est possible d’évaluer la perte de chance, par exemple, d’avoir une évolution professionnelle. Ces postes de préjudice s’évaluent au cas par cas.
Aide d’une tierce personne:
Si une victime a besoin d’une aide extérieure quotidienne, il faut évaluer cette assistance.
Préjudice scolaire / formation / Universitaire:
Là encore, l’évaluation se fait au cas par cas.
Par exemple, il est possible d’imaginer un étudiant qui a raté son année et qui ne pourra plus accéder à la formation professionnelle envisagée.
Les préjudices extra- patrimoniaux:
Temporaires:
Déficit fonctionnel temporaire (DFT):
L’Expert va évaluer si la victime avait une incapacité totale ou partielle, jusqu’à la consolidation.
Prenons l’exemple d’une personne victime d’un grave accident routier. Cette personne subit une intervention chirurgicale et est hospitalisée durant un mois. Le déficit fonctionnel temporaire sera total durant 1 mois. Puis, cette personne rejoint son domicile mais doit encore être immobilisée et suivre des séances de rééducation. Là, son déficit fonctionnel temporaire sera partiel.
Maintenant, le travail de l’Avocat sera de chiffrer ce préjudice. Pour cela, il se référera à un barème.
Souffrances endurées:
Ce poste prend en compte aussi bien les souffrances physiques que morales. L’Expert va évaluer ce préjudice selon une cotation précise : de 1 à 7 (des plus légères aux plus importantes). Ensuite, l’Avocat interprétera cette cotation et chiffrera selon le barème.
Préjudice esthétique temporaire:
Ce poste permet l’indemnisation d’un préjudice esthétique qui est seulement temporaire. Par ex : victime d’une agression, une personne a reçu un violent coup de poing qui a eu pour conséquence de lui casser 3 dents. Le sourire est affecté, ce qui cause un préjudice esthétique.
Permanents :
Déficit fonctionnel permanent (DFP):
Après consolidation, lorsque le handicap perdure, l’Expert évalue le DFP.
Le handicap est représenté par un pourcentage en fonction des troubles. Par ex : une victime qui garde des séquelles assez importantes aura un DFT à 10%.
Ensuite, pour chiffrer ce préjudice, il convient de connaitre l’âge de la victime à la date de la consolidation. En effet, chaque tranche d’âge correspond à une somme.
Par ex : la victime a un DFT à 10% et est âgée de 35 ans au moment de la consolidation. Il convient de se référer à la somme correspondant à sa tranche d’âge et à son taux de DFT. Cette somme sera multipliée par le taux de DFT.
Préjudice d’agrément:
Ce poste sera évalué véritablement au cas par cas. C’est, par exemple, le cas d’une victime qui jouait au tennis et qui s’est vu perdre les fonctions d’un bras
Préjudice esthétique permanent:
Il s’agit d’indemniser les personnes ayant subi un préjudice esthétique qui ne pourra disparaître avec le temps. Ex : grands brûlés, perte d’un membre, mutilations
L’évaluation de cette indemnisation se fait sur le même schéma que pour les souffrances endurées.
Il y a d’autres postes de préjudices qui peuvent être pris en compte (préjudice d’établissement, préjudice sexuel …) que la victime soit directe ou indirect. Evidemment, chaque cas est différent et le chiffrage se fera véritablement au cas par cas.
Le travail de l’Avocat est donc particulièrement important pour chiffrer au mieux le préjudice subi afin de l’indemnisation alléguée soit la plus juste possible.
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